Résumé:
Au terme de ce travail de recherche, plusieurs remarques s’imposent. Tout d’abord, le but de ce mémoire était double ; d’une part il s’agissait de montrer que le texte théâtral pouvait être lu et étudié comme œuvre littéraire sans pour autant faire appel à la réalisation scénique, d’où l’affirmation de l’un des pionniers des études théâtrales Jiri Veltrusky (Cf. introduction).
« […] le texte dramatique peut aussi se constituer en une œuvre littéraire de plein droit : les textes dramatiques publiés s’adressent à des lecteurs tout autant sinon d’avantage qu’aux acteurs ou aux metteurs en scène. Un lecteur qui lit une pièce de théâtre n’est pas forcé d’imaginer une réalité scénique correspondante : il peut tout aussi bien interpréter les indications des didascalies comme des indices indirects qui permettent d’imaginer l’univers diégétique de la pièce. »
Et d’autre part, il s’agissait de proposer une interprétation des discours des femmes en interpellant et en interrogeant la socialité des deux oeuvres dans leur textualité. En conséquence, notre démarche a été essentiellement « sociocritique».
Nous avons, néanmoins, procédé à une analyse discursive afin d’interpréter et de révéler la signification des discours de femmes.
Nombreuses études ont été consacrées à la femme, son statut et sa place dans la société. Elle a toujours été objet et sujet de réflexion, notamment dans la tradition musulmane où la problématique de la femme reste, aujourd’hui, en débat. En rapport avec notre objet de recherche, nous espérons que ce travail, malgré toutes les maladresses et les insuffisances d’une première tentative, fera avancer cette réflexion.
Au départ, le corpus choisi était « Au-delà du voile » et « Les fils de l’amertume ». Sauf que tout au long de l’analyse il s’est avéré que la première œuvre constituée, à elle seule, un champ d’investigation extrêmement riche et complet, ce qui fait que nous avons étudié beaucoup plus les extraits de la première pièce. Les extraits de la pièce : « Les fils de l’amertume » ont servi d’appuis et de comparaisons.
Ensuite, notre mémoire s’est constitué à partir d’une même, d’une seule interrogation : Comment se manifeste la socialité des deux textes à travers ce discours féminin ? Sauf qu’au-delà de cette question il y avait deux problématiques. La première qui était assez visible, notamment à l’étude du titre , concernait la problématique de l’identité où la femme revendiquait son droit à un statut social en tant qu’individu indépendant, libre. Et la deuxième, moins évidente, était une problématique de langages.
Dans la partie analytique (deuxième chapitre) et dans l’analyse sociocritique (troisième chapitre) nous avons pu répondre à notre problématique : Quelle société les discours de femmes construisent-ils ?
Le deuxième chapitre et plus précisément « L’analyse discursive du corpus » nous a permis de situer le statut de la femme non seulement par rapport aux hommes mais aussi à travers trois domaines : le religieux, le politique et le social. Les femmes s’imposent largement dans cette société. Leur pouvoir se traduit dans l’action.
Dans le troisième chapitre : « L’analyse sociocritique », nous avons pu aboutir à un résultat explicite. Nous avons conclu à une société matriarcale.
En fait, au-delà de l’action, cette société est tenue par les femmes. Les hommes sont complètement absents, ils ne s’imposent, ici, dans notre corpus, qu’avec le discours. En réalité, cette société est construite sans les hommes, ils n’existent pas en tant que personnes mais comme sujet de dialogue et par le dialogue seulement.
Ce qui nous amène à dire que les hommes sont effacés, ils représentent l’éphémère ; la parole. Alors, que les femmes représentent le réel ; le concret.
Slimane Benaïssa écrit dans une rigoureuse réalité, le dialogue que le théâtre permet. Le sens qu’il donne au mot femme est : « Je ne me perdrai pas à dire ce que les femmes furent pour moi. Non pas par indigence, mais par prudence. Mais ce qu’il y a de sûr, c’est que chaque fois que j’ai été censuré, c’est par des hommes. Et si aujourd’hui, en tant qu’intellectuel et artiste algérien, je suis menacé de mort, c’est encore et toujours par des hommes. Je suis d’un genre qui souvent me fait honte et je l’assume. J’aime l’autre genre, et j’essaye de l’assumer. »
Il est un porte-parole des femmes, il nous livre leur difficulté à exister au milieu des multiples pièges que leur tendent la tradition, le machisme, et l’intégrisme. Ses pièces rendent hommage à l’exigence, à la rage de vivre de ces femmes niées, sacrifiées.
Toujours dans la peau des femmes, il essaye d’inventer une manière de rompre le silence. Silence où les femmes doivent s’abstenir pour ne rien dire, pour cesser de parler, pour ne plus exister. Mais le risque le plus terrible est de se taire, alors Slimane Benaïssa poussé par le désir de dire, leur donne la parole à travers ses écrits afin de situer le conflit.