Résumé:
La question du recours à la L1 en cours de langue étrangère, a certes été beaucoup
étudiée en didactique des langues néanmoins cette pratique a été approchée selon un point de
vue où différents aspects ont été peu pris en compte. En Algérie, cette pratique s‘avère encore
plus problématique lorsque la L1 est l‘arabe algérien et la langue étrangère cible est le
français. Si certains enseignants admettent y recourir, d‘autres minimisent ce recours. La
raison en est que cette pratique est entourée d‘un flou didactique qui la rend difficilement
saisissable. Évoluant dans un terrain complexe caractérisé par l‘hétérogénéité, la pluralité et la
variation, elle ne peut être approchée que dans une conception où sont prises en compte
concomitamment la dimension didactique et la dimension sociolinguistique. Au lieu de la
considérer seulement d‘un point de vue restrictif, celui de la classe, cette recherche a choisi de
la considérer d‘un point de vue principalement sociolinguistique en tenant compte des
pratiques langagières en général en lien avec les pratiques didactiques mettant en œuvre cette
pratique à l‘école. Et c‘est la raison pour laquelle cette recherche s‘inscrit résolument en
sociodidactique. C‘est à la fois un renouvellement théorique et méthodologique. La
compréhension de l‘évolution du recours à l‘AA au centre de la problématique a nécessité de
recourir à une méthode spécifique : la méthode biographique. Des entretiens biographiques
ont été réalisés auprès de dix sept (17) enseignants de français (anciens et nouveaux) exerçant
au niveau moyen (collège). Cette méthode a consisté à recueillir les témoignages (passés
inévitablement par le filtre des représentations) de ces derniers concernant leur rapport aux
langues et les apprentissages des langues durant tout leur parcours d‘apprenants nécessitant la
prise en compte de la dimension temporelle (trop souvent négligée en recherche). Il s‘agit
entre autres d‘apporter des éclairages non seulement sur le recours à l‘arabe algérien pratiquée
en classe mais surtout sur l‘évolution de cette pratique à travers le parcours scolaire et plus
tard professionnel de l‘enquêté. Dans cette perspective, les entretiens biographiques se sont
révélés être très efficaces pour l‘identification de pratiques plurilingues dans un contexte
sociolinguistique caractérisé par la pluralité à l‘exemple du terrain de cette recherche. Enfin,
en opérant un retour sur le passé langagier de ces locuteurs, la finalité est de comprendre leur
présent langagier. En effet, les enquêtés choisissent leur langues en fonction de la nature des
situations de communication de leur quotidien (formelles comme informelles), des espaces (à
l‘école comme à l‘extérieur de l‘école), des interlocuteurs engagés dans l‘interaction (élèves,
professeurs de français, professeurs des autres matières, famille, amis…). Il s‘agit de
comprendre Quand ? Comment ? Avec qui ? Et pourquoi, ils recourent à l‘arabe algérien ?